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La partie instrumentale, en provenance de Paris, fut expédiée à Rodez en 8 caisses par chemin de fer dès le mois de décembre. Quant au buffet
(construit par l’atelier de Lyon), il ne fut livré qu’en février (MERKLIN travaillait également à la réfection du Grand Orgue de St Eustache à Paris).
C’est l’équipe de «monteurs» qui venaient d’achever l’orgue de la Cathédrale de Tours qui installa l’orgue de Rodez. L’instrument, harmonisé par
Monsieur VOGT fut fin prêt pour le jeudi 15 mars 1877 : journée consacrée à la réception des travaux et à l'inauguration de l’orgue.
Bien que cela lui «constitue un nouveau sacrifice» Joseph MERKLIN souhaitait la présence comme expert de Monsieur KUNC de Toulouse et
espérait que de son côté l’Evèque de Rodez eût invité «Monsieur VERVOITTE ou un autre artiste de réputation et fait l’annonce de cette fête
musicale dans «L’Univers» et «Le Monde» journaux de Paris».
Finalement la réception des travaux se déroula comme prévu à l4 h 30 suivie de l’inauguration à l6 h... sans la présence de M. VERVOITTE (qui ne
fut pas invité par l’Evêque) ni celle de l’expert Aloys KUNC, organiste et maître de chapelle de la Cathédrale de Toulouse : en effet, ayant raté la
correspondance pour Rodez, il n’arriva... que le lendemain. Messieurs BISCHOFF (maître de la chapelle de la Cathédrale), MAGNIER (organiste du
Grand Orgue), THOMAS (organiste de St-Joseph de VILLEFRANCHE), VANGINOT (architecte) et autres experts désignés par l’évêque «ont
examiné attentivement le nouvel orgue qu’ils ont trouvé conforme au devis et aux règles de l’art et construit avec des matériaux de premier choix...
le buffet qui est en rapport avec l’architecture de la Cathédrale-Basilique produit le meilleur effet... ont admiré la belle sonorité de tous les jeux, soit
joués isolément ou dans différentes combinaisons et même dans leur ensemble... déclarent cet instrument digne d’être reçu avec honneur.»
Après la bénédiction de Monseigneur l’Evêque, le concert d’inauguration fut donné par les personnalités musicales nommées ci-dessus avec la
participation de la Maîtrise, des élèves du séminaire et de plusieurs artistes locaux (violoniste, chanteurs). Ils interprétèrent des œuvres de Bach,
Haendel, Benoist, Danjou, Mozart, Haydn, Schubert, Mendelssohn... entrecoupées par une allocution du vicaire Vaylet.
De retour à Lyon, Joseph MERKLIN écrivit, en date du 26 mars : «Je suis très heureux, Monseigneur, que vous soyez satisfait du nouvel orgue que
vous m’avez fait construire pour votre cathédrale. Si votre Grandeur voulait bien faire connaître à Son Excellence M. le Ministre la satisfaction
qu’elle a éprouvée, cela pourrait m’être très utile. Je prends aussi la liberté de vous rappeler Monseigneur le journal «L’Univers», qui acceptera avec
empressement un petit compte-rendu que votre Grandeur voudra bien envoyer...» !
L’instrument nous est parvenu apparemment sans aucune modification ni adjonction, tel que décrit dans le procès-verbal de l877. La tuyauterie en
étain est de très belle qualité. Muet depuis une vingtaine d’années, il vient d’être remis en état de marche par le facteur d’orgues Lucien SIMON de
Sauxillanges (63). Ces travaux ont été financés par l’Association «Les Amis de la Cathédrale» et le 29 janvier 1995 l’orgue de J. MERKLIN a pu
rechanter à nouveau dans un concert chant et orgue. On peut également l’entendre à chaque concert organisé par notre Association (ADROA) dans
la Cathédrale de juin à octobre.
A notre avis, cet instrument aurait besoin d’un relevage général et mériterait une mesure de protection au titre des «monuments historiques».
LE BUFFET
Il prend place en arrière-plan des admirables stalles d’André SULPICE réalisées entre 1478 et 1489 dans l’avant-dernière travée du chœur cathédral.
Au niveau bas, la console posée à l’emplacement d’un rang de 3 stalles basses est seule visible. En arrière de la console, les stalles gothiques et leurs
miséricordes, dosserets, dais et galerie supérieure ont été soigneusement conservées.
Au-dessus, et en léger retrait de la galerie, se dresse un buffet néo-gothique en chêne : il est composé comme une suite de 5 baies en arc brisé,
formant plates-faces et laissant apparaître 39 tuyaux de montre. La baie centrale, plus haute, est surmontée d’un simple gâble à crochets et rosace,
surmonté d’une croix et cantonné de pinacles.
Le corps de l’instrument prend la place du mur qui séparait le chœur du déambulatoire. L’arrière-buffet est constitué d’une simple menuiserie de
panneaux de chêne sans décor donnant accès à la soufflerie à bras et aux sommiers.
RÉPERTOIRE
La
conception
de
cet
orgue
(composition,
distribution
des
jeux
sur
les
claviers,
jeux
empruntés,
boîte
expressive,
sonorités,
etc.)
est
très
intéressante
pour
l'accompagnement
de
solistes,
ensembles
vocaux
ou
instrumentaux
dans
la
musique
des
XIX
e
et
XX
e
siècles.
On
peut
bien
sûr
y
jouer
de
nombreuses
pages
pour
orgue
seul
de
la
période
romantique
et
symphonique
(Guilmant,
Widor,
Franck,
Vierne...)
et
même
plus
récente.
Son état actuel (mécanique fatiguée) n’y permet pas des passages virtuoses.
RENSEIGNEMENTS PRATIQUES
PROPRIÉTAIRE
État - Conservateur de la cathédrale : M. l'Architecte des Bâtiments de France
2 bis impasse Cambon - 12000 RODEZ
AFFECTATAIRE
Paroisse Notre-Dame de l’Assomption - 24, rue de l'Embergue - 12000 RODEZ
BIBLIOGRAPHIE
- Journal «L’Aveyronnais» et «La revue Religieuse» (mars 1877)
- Archives diocésaines à l’évêché de Rodez
LA CONSOLE
CONCEPTION ET REDACTION
Georges LARTIGAU et Louis CAUSSE (Buffet) - décembre 1995
PHOTOS
Nathalie Féral
Bâtiments de France
L’INSTRUMENT
«Les grandes églises de France sont, presque toutes, pourvues d’un orgue d’accompagnement,
complément aujourd’hui indispensable de toute musique religieuse. La Cathédrale de Rodez n’en avait
pas et ce vide regrettable était depuis longtemps remarqué. Il était réservé à l’activité et au zèle
infatigable de Monseigneur BOURRET de combler cette lacune...»
Ainsi s’exprimait la Revue religieuse du vendredi 2 mars l877. Elle annonçait effectivement
l’achèvement des travaux de construction et l’inauguration de l’orgue du chœur canonial de la
Cathédrale de Rodez.
Comme suite à la demande de Mgr BOURRET, Monsieur VERVOITTE, Inspecteur général de la
musique religieuse et des maîtrises de France conseillait à l’Evêque de Rodez par courrier du 24 avril
1873 de faire appel à Joseph MERKLIN qui venait de construire l’orgue de chœur de Notre-Dame de
Paris. Celui-ci ne tarda pas à se manifester et dès le 30 avril proposa ses services au Prélat (Joseph
MERKLIN, d’origine allemande était en mauvaise posture commerciale, après la guerre de 70...).
Il fallut attendre le 20 février 1876 pour que la convention entre le facteur d’orgues et l’évêque fut
signée. Dès la fin octobre la construction de l’orgue était achevée en atelier mais le buffet posa
problème. J. MERKLIN en avait sous-estimé la construction et le financement ou bien avait envisagé un
emplacement différent : «la pose de l’instrument sur les stalles nécessite une boiserie si importante, et
si chère, qu’elle se trouve tout à fait en disproportion avec le prix convenu. J’ai la confiance que Sa
Grandeur Monseigneur voudra bien prendre en considération le sacrifice que la construction de cet
orgue m’impose et excuser le retard de quelques semaines qu’éprouve son achèvement» (lettre du 27
octobre 1876).